Le schéma DAE comportait de par sa nature un TPA optimisable (à cause de sa nécessaire séance d’évaluation). Je vais maintenant aborder la variable toute aussi importante qu’est le choix même des activités. Aucune activité n’est à l’abri d’être analysée et adaptée pour optimiser son TPA et dans le cas où ce TPA resterait trop important, il faudra chercher à remplacer cette activité par une autre plus favorable.
Ainsi, si un autre choix est possible pour une activité vieille comme l’école, cela ouvre de sacrés possibilités sur l’ensemble des activités pédagogiques ! L’optimisation du rapport TPA est donc un long chemin et j’ai pris pour habitude de ré-interroger toutes les fins d’année au moins une matière ou une activité pour la repenser et tenter de l’optimiser. Si cela ne fonctionne pas mieux (et cela arrive), j’analyse et j’en tire des conclusions qui me permettront d’adapter encore un peu mieux ou carrément de revenir en arrière les années suivantes.
En fait, je rapproche le cas de l’orthographe lexicale à celui des conjugaisons et des tables de multiplication. De nos jours, tout au long de l’école élémentaire, on demande aux élèves de les apprendre. Pourtant, Je crois que l’on se trompe profondément d’objectif. Ces listes que l’on donne à apprendre ne sont pas à apprendre mais à retenir et au final, les élèves doivent aussi être capables de se repérer dans ces listes mémorisées de manière à les utiliser de manière efficiente. C’est ça le pragmatisme !
Je privilégie donc plutôt le « recours à » et la nécessité du « recours à ». Je multiplie les situations où l’évidence du besoin peut amener le cerveau de l’élève à s’adapter et à admettre qu’il va être plus efficient de retenir le fait car il y a récurrence dans le besoin. Pour le « recours à », je laisse à la disposition des élèves les listes de tables et de conjugaison. Ils ont un sous-main sur leur table comportant une table de Pythagore et un tableau synthétique des conjugaisons, plus un accès libre au dictionnaire qui est sur leur ilot de table ou à leurs manuels.
Dans toutes ces interrogations sur le fait de retenir des faits, des listes et de savoir les réutiliser, il ne faut donc pas oublier que cela a des implications importantes sur l’autre nature de l’élève, son côté héritier. En effet, ces apprentissages par cœur sont la plupart du temps rétrocédés aux familles ! Les tables, les conjugaisons, les listes de mots, si je ne peux pas vous dire quand elles se retiennent effectivement pour chaque élève, ce que l’on peut affirmer de manière plus certaine, c’est leur lieu d’apprentissage, et ce n’est pas forcément à l’école !
Entre ma dénonciation de la dictature de la trace écrite, l’évitement des corrections formatives, « mon amour inconsidéré » pour la dictée, et mon rejet du schéma DAE, vous vous doutez bien que l’apprentissage à la maison est réduit à sa plus simple expression pour mes élèves. Pas de devoir écrit, pas de leçon à apprendre à la maison ! En proposant cela, je nourris régulièrement les inquiétudes des parents… Toutefois, j’ai pris l’habitude de répondre aux interrogations des parents par cette phrase qui est toute sauf anodine : « Pourquoi juger un enseignant au travail qu’il ne fait pas, puisqu’il vous demande de le faire à sa place, à la maison ? ». Je ne parle même pas de la reproduction sociale que l’on favorise en délégant une part de l’enseignement aux parents ! Ce que les élèves font en dehors de l’école doit être encore une fois de leur responsabilité, pas de celle de leurs parents. Avec moi, ils ont donc des lectures d’œuvres littéraires, et ils ont aussi la responsabilité de demander de l’aide éventuelle à la maison, mais de leur propre initiative. Pour les apprentissages, c’est mon travail et ma responsabilité !
La voie à la mode ces dernières années est de proposer certaines phases du schéma DAE à travers des activités ludiques. On construit des jeux, ou des semblants de jeu en espérant favoriser l’investissement des élèves. Je ne dis pas que cela ne fonctionne pas, mais au final, le rapport TPA est souvent important car ces activités sont assez chronophages en temps de préparation tout autant qu’en temps de mise en pratique, et il faut inventer de nombreux dispositifs. Alors, moi, je pose la question : quand est-ce qu’ils se mettent au travail ? Ma réponse est terrible : à la maison ! Et oui, parce que les mêmes incitateurs vont nous préconiser la fameuse trace écrite à la fin du jeu, trace qu’il faudra apprendre à la maison ! Nous y revoilà, apprendre à la maison ! Et là, je vous parie que cela ne sera pas très ludique ! Bref, on joue en classe et on travaille à la maison… Comment voulez-vous que ça marche ?
Et le pire dans tout cela, tout tortionnaire que je sois, imposant un travail long et permanent à mes élèves, je suis obligé de donner de la voix pour qu’ils arrêtent de travailler et acceptent de sortir en récréation ! Oui, le travail peut être un plaisir, c’est le cas pour moi, et c’est le cas pour une majorité des élèves dont j’ai la charge, et même ceux qui ont des difficultés !