Être remplaçant, c'est parfois une aventure. On ne sait pas où on ira en se levant, parfois même, on monte dans sa voiture et l'on prend le chemin de son école de rattachement et sur la route, le téléphone sonne ! Vite ! Trouver une place pour s'arrêter et prendre l'adresse de la mission. Et là, en ce matin du 16 septembre, on me missionne pour un remplacement dans l'école où je fus élève, là où j'ai commencé l'école, ma maternelle, mon Cp et mon Ce1 !
Petite accélération cardiaque... Le niveau ? Aujourd'hui ce sera un Cm1-Cm2 ! Ça fait du bien de retrouver des grands, car depuis le début de l'année, je fais surtout du Cp. Mais l'idée de retrouver mon école, une école dans laquelle je n'ai pas mis les pieds depuis plus de 45 ans et que j'avais quitté à la fin de mon Ce1 est bien motivante !

Ce qui est plus important dans tout cela, c'est la place que je donne à cette école dans la construction qui fut la mienne pendant ces premières années de scolarité. Je vous renvoie à la partie A de mon livre "Rendre chaque élève de Cm1-Cm2 responsable de ses apprentissages", quand je raconte mon histoire et mon parcours. Je parle assez longuement de ces années-là, de mon absence de souvenirs de maternelle, puis de mon très mauvais souvenir du Cp, pour finir par évoquer l'année magique de Ce1 que j'y ai passée ! Alors oui, pendant ma petite demi-heure de route, des souvenirs remontent !
Et quand je quitte la voiture sur le parking, j'hallucine rapidement. Me voici au bord du chemin où j'ai appris à distinguer la droite de la gauche (ça aussi je le raconte dans mon livre). Passée la grille d'entrée, je me retrouve près de 50 ans en arrière : là, à droite, le terrain de handball, je le reconnais ! A l'époque, je ne suis pas sûr qu'il y avait les buts, mais le plateau goudronné était bien là. Je me souviens que la prévention routière venait une fois par an et y installait une piste provisoire.

Je me souviens aussi de la petite pente en herbe où, au printemps, on ramassait des coquelicots de toutes les couleurs. Plaisir des années 70, on cueillait le bouton du coquelicot non encore ouvert en essayant de deviner sa couleur... Je suis sûr que certains se souviennent d'avoir fait ça... Et ces pensées cheminant, me voici dans les bâtiments... J'entre par l'ancienne salle de motricité, là où je raconte dans mon livre mon seul souvenir de maternelle (la vaccination collective). Puis me voilà dans la classe de mon remplacement. A mon époque d'élève, c'était la classe de Ce2 dans laquelle je n'eus pas le droit d'aller en ne "sautant" pas mon Ce1, fait fondateur en réalité.

Bon, maintenant, j'ai du travail ! La collègue m'a préparé tout le travail ! Nickel, avec une classe très sympa. Une bonne journée ! A la récréation et à la pause méridienne, je vais visiter ma fameuse classe de Ce1, la classe de Mme Maréchal... Alors je raconte aux collègues, deux sont dans l'école depuis plus de 20 ans, mais je leur parle d'un temps que même elles n'ont pas connu ! Bon ce n'est pas à ce moment que l'on se sent le plus jeune... Mais quel plaisir d'être là !

C'est ici que tout a commencé...
Qu'est devenue ma classe ? Et bien elle est désaffectée, une fermeture de classe en fin d'année dernière... L'école ne compte plus que 3 classes, alors qu'elle en comptait 5 (en élémentaire) quand j'étais petit. Une école de campagne qui se meurt petit à petit, comme tant d'autres... Du coup, la classe est un peu vide, mais d'un autre côté, l'aspect fantôme du passé n'en est que renforcé. La classe a été repeinte, mais c'est elle. Je revois la cour de récré, celle où j'ai aussi quelques souvenirs... Je me re-projette alors dans tout ce que j'ai pu écrire dans mes livres, et je ne peux m'empêcher de me dire : "C'est ici que tout a commencé..."
C'est dans cette classe que j'ai découvert le plaisir d'apprendre à l'école, c'est ici que j'ai appris à lire, c'est là qu'a débuté ma passion des mathématiques, c'est à partir de là que tout s'est mis en place pour mes études, du Ce1 au Doctorat, du CRPE à mon poste actuel de remplaçant, en attendant la prochaine étape que j'espère franchir bientôt.
Je pose alors ma main sur le mur du fond de la classe, celui que j'ai tant regardé quand je faisais les mathématiques (modernes) ici, quand j'avais fini le travail plus vite que les autres, quand je regardais avec émerveillement le grand cube contenant les 1000 petits cubes de numération. C'était là, j'avais 7 ans, et c'est resté gravé dans ma mémoire. Tout a commencé ici, et c'est pourquoi mon livre commence également par raconter cette histoire.

Cette petite expérience me permet aussi de prendre encore un peu plus conscience qu'un enseignant, qu'une classe peut tout changer. Mme Maréchal n'a certainement jamais su ce qu'elle avait initié par sa bienveillance, par sa pratique du métier qu'elle faisait certainement avec autant de passion que beaucoup d'entre nous. Cela m'oblige, cela nous oblige tous... Aurons-nous un tel impact sur quelques enfants ? Aurons-nous un impact plus négatif sur d'autres ? Nous ne sommes sûr de rien, et c'est certainement mieux ainsi. Faisons notre travail avec investissement, avec bienveillance et avec passion, le reste ne nous appartient jamais totalement, quoique puisse en dire notre institution parfois ! Le concept du Système Dynamique Non Linéaire doit nous aider à nous garder des certitudes...

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Pour une entrée plus théorique :
Rendre chaque élève de Cm1-Cm2 responsable de ses apprentissages
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Enseigner par plans de travail en Cm1-Cm2 : le guide pratique
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