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Le Roman de l'année : Semaine 4 - La fin du premier plan de maths



 

Chapitre 9 - La fin du premier plan de maths

 

Voilà une nouvelle semaine qui commence… Une semaine « normale » : pas de conférence pédagogique, pas de réunion avec les parents ! Je vais sortir de l’école à l’heure « normale » tous les soirs. Mais cette semaine est pourtant un évènement pour la vie de classe : on va finir le premier Plan de Travail CPR, le plan M1 de mathématiques.

 

 

Vendredi soir, j’en étais resté à mes craintes de ne voir que peu d’élèves le valider, mais par expérience, je sais que rien n’est jamais perdu et que les derniers jours sont parfois très surprenants !

 

 

 

 

Histoire d’une première fin

 

Alors dès ce lundi matin, lors de la première séance de la semaine, je lance le régime des priorités de fin de plan. A partir de cet instant et jusqu’à jeudi (fin du plan), seront prioritaires ceux qui peuvent atteindre un palier au moins le minimum vital (cO). La première règle, c’est qu’il doit y avoir au moins un point jaune dans chaque compétence, c’est-à-dire que l’élève a travaillé de manière équilibrée et orientée vers l’objectif d’atteindre ces paliers. En premier, il y a ceux qui ont déjà atteint le palier cO (un point bleu dans chaque compétence). Ils seront prioritaires tant qu’ils n’auront pas validé le plan. Ceux-ci identifiés, il me reste à choisir le reste des prioritaires parmi ceux qui sont entre les paliers Po et cO. En général, je me limite à la moitié de la classe, sinon, ce ne sont plus des prioritaires. Alors je prends ceux qui ont le moins besoin de points bleus pour atteindre le palier cO.

 

 

Au final, quelques très bons élèves potentiels se font prendre et ne sont pas prioritaires en ce début de semaine. La plupart du temps c’est lié à une mauvaise stratégie. Par exemple Oksana a fait 4 exercices dans 2 compétences, mais aucun dans 2 autres. Du coup, elle n’est pas prioritaire. C’est une première prise de conscience pour certains ! Marthe, qui n'a pas arrêté de bavarder depuis 3 semaines prend également conscience que le plan va être bien dur à valider… Je vois bien que cela la mache un peu quand même. Mais en ce lundi, cela ne l’empêche pas de continuer à bavarder ! Mais bon, globalement, je vais un peu moins l’entendre et le travail va enfin commencer à avancer !

 

 

A midi, je refais le point sur les cahiers car tout le monde n’est, bien entendu, pas passé au bureau. Certains prioritaires ont bien profité de leur avantage pour venir 3 ou 4 fois, mais pour les non prioritaires, très peu ont eu la chance d’avoir une ouverture (c’est-à-dire un moment où il n’y a plus d’étiquette dans la zone prioritaire). En regardant les cahiers, je corrige et je valide pas mal d’exercices. Je choisis toujours ces dernières séances pour assouplir ma rigueur orthographique. Si je ne valide pas les exercices comportant des erreurs d’orthographe pendant les 2 premières semaines du plan, je le fais pendant la dernière semaine, assumant quand même que je vais évaluer une compétence mathématique ! Ceci étant, cette rigueur demeure avec les plus avancés ! C’est là l’un des côtés personnalisation des parcours de la Pédagogie CPR.

 

 

En faisant ainsi, quelques élèves se retrouvent prioritaires et certains vont perdre leur position car je garde toujours mon ratio de la moitié de la classe environ. La bonne nouvelle de ce lundi matin, c’est qu’Ines et Ulyana ont réussi à valider leur plan. Du coup, je les enlève des prioritaires. Ceci ne va les empêcher de continuer à travailler, mais cela laisse 2 places de prioritaires en plus pour les élèves entre Po et cO, ceux qui ont le plus besoin de mon étayage à ce moment du plan.

 

 

 

 

La séance d’APC

 

En fin de journée la séance d’APC continue sur la même lancée ! Les 8 élèves présents (seulement car 2 n’ont pas fait signer les autorisations) vont pouvoir user et abuser des passages au bureau. Je réexplique, je guide, j’encourage et les points bleus tombent ! Cela rebooste quelques élèves (à part Nathan qui bien que volontaire pour venir n’a pas fait grand-chose de sa séance). A 16h30, Nina et Lou sont devenues prioritaires et j’ai très bon espoir qu’elles puissent valider leur plan jeudi. Ça va être chaud, mais c’est maintenant envisageable. Et elles l’ont bien compris toutes les deux. Vraiment, elles ne regrettent pas d’être venues en APC cette semaine ! Ce n’est pas celles que je pensais voir valider un plan en premier. Comme quoi, tout le monde a sa chance, et cette bonne surprise compense aussi les petites déceptions, comme Paul ou Ilyan, par exemple, qui n’ont pas réussi à passer prioritaires (ils n’ont pas fait non plus preuve de grande stratégie pour y parvenir...) et je me demande vraiment comment ils vont faire pour s’en sortir. En Cm1, ils étaient pourtant considérés comme faisant partie des tous meilleurs élèves de la classe ! Mais un plan CPR, ça se mérite, et là entre bavardages et mauvais choix, le compte n’y est pas !

 

 

 

 

La dernière séance

 

 

Déjà jeudi, dernière séance de ce premier plan de mathématiques. En rentrant de la récréation du matin, quand je regarde les élèves se mettre au travail (ou plus exactement de faire semblant de se mettre au travail pour certains), je me demande s’ils ont vraiment saisi l’urgence de la situation… Alors je redis, j’insiste : « il ne reste qu’une heure avant la fin... » « Il ne reste plus que 30 minutes… » « Attention, il ne reste qu’un quart d’heure ! » « On attaque les 5 dernières minutes ! »

 

 

Et toute la séance, j’ai Nina et Lou qui font le siège du bureau ! Je ne compte pas leurs passages, mais elles viennent peut-être 10 fois chacune ! Les points bleus viennent les uns après les autres et même si les aiguilles avancent vers l’heure fatidique, ce pourquoi elles se battent depuis lundi finit par arriver : Nina d’abord, Lou ensuite valident le 12ème et dernier exercice pour assurer le palier cV du plan ! Elles ne sont pas peu fières d’avoir réussi leur plan ! Et elles ont raison, elles ont fait le boulot ! Et même si elles ont bénéficié de la séance d’APC de lundi, elles sont responsables de leur réussite : les choix ont été les bons, et parmi ces choix, il y a eu celui de venir en APC. Ceux qui ont refusé cette possibilité n’ont pas, eux, réussi à valider le plan ! Je suis certain qu’elles vont s’en souvenir !

 

 

Pour Paul, ce n’est pas la même histoire… Il a pourtant réussi à basculer prioritaire mardi midi, mais là, il ne vient pas au bureau. Dans sa tête, il a abdiqué : C’est sûr pour lui, il ne validera pas le plan et la déception est grande ! Mais ne rien faire n’est que continuer à adopter la mauvaise stratégie. A midi, il lui manque toujours 3 points bleus. Le palier cO est atteint, mais on est très loin de ses objectifs ! Ce qui est le plus stupide, c’est que Nina a validé 4 exercices dans la séance ! Avec ses capacités, en venant lui aussi au bureau, il aurait eu vite fait de réussir les 3 exercices qui manquaient ! Au lieu de ça, à midi, il sort de la classe en pleurant.

 

 

3 élèves vont pleurer lors de cette fin de plan. On peut se dire que c’est dur de les voir ainsi. Oui, mais c’est aussi bon signe ! Ils sont profondément déçus et pas de doute qu’ils vont rectifier le tir par la suite ! C’est pour ça que je leur dis en face : « On a le droit de se tromper, on a le droit de rater le premier plan de l’année, ce n’est pas grave, il en reste 8 en mathématiques et il y a celui de français dès la semaine prochaine. Et puis, si tu pleures, c’est parce que tu veux réussir et ça j’aime bien, c’est bon signe. Je serai là pour t’aider ! Mais il faudra venir plus souvent au bureau ! »

 

 

A côté de ça, Marthe a une belle surprise ! Elle part elle aussi le midi en se disant qu’elle a raté son plan. Son orgueil est touché également, mais elle ne le montre pas autant que Paul ! Mais en corrigeant son cahier une dernière fois, je lui valide un dernier exercice qu’elle a corrigé dans les dernières minutes et le cC obtenu au Super-défi (les 50 calculs en 5 minutes) lui donne un joker qui lui permet d’obtenir (virtuellement) le point bleu qui manque : et hop ! Plan validé ! Ceci étant, sur son bilan, la compétence restée à cO le restera, mais le plan est réussi et c’est pour elle le principal indicateur de réussite, elle peut rebomber le torse, son honneur est sauf !

 

 

Et sans faire de bruit, c’est Ulyana qui me surprend encore. Mardi à midi, sans qu’elle ait pu passer au bureau pendant la séance, je lui ai validé 3 exercices de plus. Avec son plan déjà validé, il ne lui manque plus que 3 points bleus pour atteindre le palier cC. Je lui redonne donc priorité pour jeudi et elle atteint sans difficulté le palier cC en validant 1 exercice à chaque passage au bureau. Comme elle est arrivée dans l’école à la rentrée, je la découvre. Elle a certainement un sacré potentiel et je suis persuadé qu’elle va atteindre le palier Xp sur pas mal de plans ! Ça va certainement titiller les quelques élèves qui voient leur statut (parfois auto-proclamé) de meilleur élève de la classe revu sérieusement à la baisse ! Surtout que Yann, nouveau dans l’école arrache lui aussi le palier cC au dernier moment ! Lui, je ne l’avais pas vu venir en début de semaine, mais il a adopté de suite une stratégie très efficiente. Il ne bavarde pas et vient peu au bureau, mais
le travail est de grande qualité !

 

 

 

Le challenge d’automne

 

Au cours de cette semaine marquée par la pression de cette fin de plan, le challenge d’automne est donc un moment de répit moral pour les élèves. Lundi, par ce beau temps de fin septembre, on s’entraine sur le stade pour 2 nouvelles épreuves.

 

 

L’épreuve individuelle est le lancer de précision. Encore un truc que j’ai inventé ! Je ne souhaitais pas donner une prime au plus fort de mes élèves et je souhaitais donner une chance à tous les équipiers de ramener des points pour leur équipe. Du coup, je délimite un carré avec 4 cônes dans le bac à sable. Dans ce carré, je pose un cerceau et dans ce cerceau je pose un autre cône. Les élèves tirent à quelques mètres du dispositif avec un poids modèle enfant.

 

 

Au niveau technique, je fais dans le simple, ils doivent lancer le poids avec les deux mains en le tenant entre les jambes. Là encore, j’évite les mauvais gestes et les blessures. Si le poids atterrit dans le bac à sable en dehors des zones, le lanceur marque 1 point. Dans le carré des cônes, c’est 3 points, dans le cerceau, c’est 5 points et le graal, si on touche le cône central à l’atterrissage (pas en roulant), c’est 10 points de gagnés. A ce petit jeu, lundi, 3 élèves parviennent à faire un 10. Ils rééditent tous ce bon lancer mercredi lors de la compétition avec une Yona qui en plus réalise 2 fois l’exploit ! Il faut les entendre crier et féliciter ceux qui font le 10 points ! Que ça peut faire du bruit 26 Cm2 ! Mais c’est bon-enfant et positif, alors je laisse faire…

 

 

 

 

Pour l’épreuve collective, c’est une autre histoire qui se joue. Je propose une épreuve de cross en équipe. Chaque équipe doit faire 5 tours d’un parcours relativement long avec un peu relief. Mais j’annonce la règle qui tue : « A chaque tour, j’arrête le premier de chaque équipe ! ». Je leur laisse un peu de temps pour s’échauffer avant la course car ce n’est pas le lancer qui les a préparés.

 

 

Avant de lancer la course, je fais un tour en marchant devant eux, cela me fait toujours un peu de sport et je peux ensuite donner des pénalités à ceux qui se trompent dans le parcours, et il y en a tous les ans. En ce lundi d’entrainement, seule l’équipe orange met en place une réelle stratégie. Je les entends discuter pendant le temps de marche qui précède le départ : « C’est Ulyana qui doit s’arrêter avant Loana ! On attend tous Alison et on reste avec elle pendant le premier tour ! ». Je ne dis rien, j’observe et j’écoute. Et effectivement, les Orange gagnent la course haut la main !

 

 

Qu’on fait les autres équipes ? Et bien, elles n’ont pas couru en équipe. Ilyan est parti à fond, Nina, pas beaucoup mieux et Adam a fini au sprint pour passer la ligne devant Rayan son équipier plus faible que lui. Après 3 tours, à part chez les Orange, tous les bons coureurs sont arrêtés et ils donnent de la voix ! On encourage ou on ouspille, cela dépend des équipes ! Et ils font un bruit ! Que ça peut faire du bruit une classe de Cm2 ! Oui, mais cette fois, je ne laisse pas faire. Je hausse la voix très fortement : « Je vous pose une seule question, vous criez sur les autres pour qu’ils courent plus vite, mais en fait qu’est-ce que vous faites là, assis comme ça ? »

 

 

La question a le mérite de les faire taire quelques secondes. L’état de grâce ne dure jamais très longtemps ! Et comme, ils ne me répondent pas et que certains de leurs équipiers n’en peuvent plus. En fait de course, ils marchent plus qu’ils ne courent… Alors les invectives reprennent : « Mais courre Nour ! Dépêche-toi Arthur ! », rien n’y fait, ils sont au bout du rouleau et la course se finit à la marche, sauf pour les Orange qui ont su garder leur meilleure coureuse car elle peut pratiquement tenir les 5 tours en courant. Pour les autres, ce sont ceux qui ont le moins d’endurance que les autres ont laissés finir la course !

 

 

Alors, petit à petit, je relance le questionnement : « et pourquoi vous leur demandez de courir alors que vous, vous avez fait le choix de courir moins longtemps ? » Et là, je sens que ça commence à réfléchir. « C’est une course en équipe, seul le dernier passage sur la ligne compte, courir vite sur le premier tour ne sert à rien ! » Je félicite au passage les Orange.

 

 

Mercredi, compétition ! C’est un autre jour ! Toutes les équipes ont revu leur stratégie et ce n’est plus la même course. On attend les plus faibles, on les fait passer la ligne en premier et on accélère ensuite. Quel dommage pour les Orange, les autres ont compris et courent beaucoup mieux. C’est cruel, les Orange finissent 4ème sur 5 ! A ce jeu, les Rouge restent les « mauvais élèves » avec encore une élimination précoce des meilleurs, mais leur bon lancer (grâce à Yona), leur permet de garder la tête du classement. Ce sont les Jaune qui gagnent le cross. Ils sont toujours seconds. Les Orange clôture le classement, décidément, ils se battent mais n’arrivent pas à reprendre les points perdus lors de la première semaine !

 

 

Au bilan de la semaine

 

 

Un premier plan fini, des étoiles perdues à foison (plus d’une centaine !), un challenge passionnant, ce fut une bonne semaine (si l’on oublie un peu le bruit permanent dans la classe). On a rechangé de place tous les élèves avec toujours 4 exclus des ilôts. Pour 2 d’entre eux, ce sera la deuxième semaine d’affilée !

 

 

Je résume la situation vendredi matin en rendant aux élèves le plan qu’ils vont faire signer à leurs parents : « Il va falloir cesser les bavardages, changer les priorités et montrer enfin ce dont chacun est capable, parce que là, on n'y est pas ! »

 

 

Vendredi, on a aussi commencé doucement à se focaliser sur la fin du plan de français qui se termine la semaine prochaine. Je pensais qu’ils allaient avancer plus vite en français, et bien quand je fais le bilan des priorités de fin de plan, je me demande si ce n’est pas pire que la semaine dernière !

 


Bon il y aura encore de l’APC pour les volontaires, il y aura encore des surprises, rien n’est encore écrit.

 

 


Note de l'auteur : le roman de l'année est un roman ! Il s'agit d'une fiction, même s'il s'appuie sur ma réalité de professeur des écoles.

Objectif premier du roman de l'année : Accompagner les nouveaux professeurs en Pédagogie CPR

Ce qui est réel :

- Temporalité et paramètres de la classe

- Les anecdotes sont réelles, mais pas de l'année en cours.

Ce qui est fictif :

- les élèves et leurs résultats, les personnages secondaires.

(Ils n'ont pas de lien avec qui que ce soit)

- L'école et son environnement. Issiella n'existe pas !



 Crédit photos : beanico-photo (www.beanico-photo.fr)

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Chapitre 9


Chapitre 10




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